Bienvenue

Chers amis,

Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue sur mon nouveau blog. Vous y trouverez des informations fiables, rapides et précises sur le travail que je mène à l'Assemblée nationale mais aussi à Wallis et Futuna.

Je vous souhaite une bonne navigation.

Albert Likuvalu

mardi 24 mai 2011

Une stratégie nationale pour la biodiversité

Ce dimanche 22 mai, a été l’occasion de fêter la biodiversité, de sensibiliser les citoyens aux services qu’elle nous rend et nous mobiliser tous contre son érosion.

La biodiversité est primordiale et doit être protégée. Elle offre aux sociétés humaines une quantité de services, dits services écologiques ou écosystémiques (SE), dont elles bénéficient et en tirer avantage, directement ou indirectement, des écosystèmes pour assurer leur « bien-être », c’est-à-dire répondre à leurs besoins.
Le développement humain a été façonné par l’environnement et cette interconnexion est également d’une grande importance au niveau social, culturel et esthétique.

Le rôle joué par la biodiversité dans la production du bien-être humain est irremplaçable. Que faisons-nous dès lors pour la sauvegarder et continuer à jouir des services qu’elle nous offre ?

L’année 2010 a été l’année internationale de la biodiversité. Elle a été marquée par une succession d’évènements à l’échelle locale, nationale, régionale ou internationale mobilisant les citoyens autour de la problématique de la perte de biodiversité, assurance-vie commune à l’humanité.

La 10e conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique à Nagoya en octobre 2010 a permis de clôturer cette année avec un succès relatif : l’évènement international a en effet eu le mérite de rassembler l’ensemble de la communauté internationale autour d’une table pour discuter de la mise en œuvre d’une réponse mondiale efficace et durable à la question de la perte de biodiversité.

Six mois après, le constat est évidemment identique : l’empreinte écologique humaine (pollution, bouleversement du climat, surexploitation des ressources naturelles) a doublé depuis 1996, érodant au jour le jour la capacité du vivant à évoluer et détruisant, en corollaire, les services écosystémiques dont nous dépendons tous.

La Commission européenne a publié ce mardi 3 mai son plan d’action destiné à stopper la perte de biodiversité et la dégradation des services écosystémiques d’ici 2020, et à les restaurer dans la mesure du possible.

Ces objectifs sont en fait ceux que les dirigeants européens ont adoptés lors de leur sommet de printemps en mars 2010. Ils ont aussi décidé à ce moment-là que l’UE devait faire plus pour protéger la nature au niveau mondial. La nouvelle stratégie met en musique les engagements domestiques mais aussi internationaux sur la biodiversité, adoptés à la conférence internationale de Nagoya (Japon) en octobre dernier.

La Commission propose 6 sous-objectifs visant à s’assurer le succès de son plan, là où son plan de 2006, qui visait à mettre fin à l’érosion de la biodiversité en 2010, a échoué.

De cette nouvelle stratégie, nous pouvons relever avec enthousiasme qu’elle s’attaque enfin aux racines économiques de la perte de biodiversité, solidement documentée par l’Agence européenne de l’environnement, et qu’elle désigne clairement les rôles de chaque secteur. Ainsi la nouvelle stratégie souhaite notamment accroître la contribution de l’agriculture et de la foresterie au maintien de la biodiversité. Le document impose par là ses objectifs aux politiques sectorielles de l’Union (agriculture, forêt, pêche) dont l’impact est assez important sur la biodiversité. A ce titre, le commissaire européen à l’environnement, Janez Potocnik, avance le souhait d’accélérer et de généraliser le processus de prise en compte de l’aspect biodiversité dans la conception et l’exécution de toutes les politiques, parmi lesquelles les politiques agricoles, pour lesquelles il est pertinent compte tenu, en particulier, des avantages que de nombreux secteurs, dont l’agriculture, tirent de la biodiversité et des services écosystémiques. Il propose d’accroître, au sein de la PAC, les aides directes aux exploitations qui dépassent les exigences de l’éco-conditionnalité. Cette proposition a été critiquée par le Gouvernement français qui ne souhaite pas que la stratégie nationale pour la biodiversité préempte la réforme de la PAC en forçant son « verdissement ». En conséquence de la posture française, l’objectif originel de la Commission qui était d’assujettir 60 % des terres cultivées bénéficiant de subventions européennes à des mesures de protection de la biodiversité, a malheureusement disparu du plan d’actions.

Cet arbitrage trop frileux n’est pas au goût des ONG et des écologistes, qui ont fustigé le manque de substance du plan de la Commission.

Nous pouvons regretter l’ambiguïté de la stratégie qui se reporte à d’autres étapes comme le vote du budget pluriannuel en juin ou la réforme de la PAC (dans le cadre de laquelle Janez Potocnik a déjà présenté des propositions intéressantes : rémunération des agriculteurs pour leur rôle dans la protection de nature, obligation de conformité à la directive-cadre européenne sur l’eau pour ceux qui obtiennent des subventions européennes et obligation de réaliser des plans de gestion des forêts pour toutes les forêts d’une certaine taille dès 2020 ) et de la politique de la pêche.

La stratégie nationale pour la biodiversité aurait en outre pu peser davantage si elle était in fine l’expression d’une réelle volonté politique de faire de la biodiversité un enjeu des politiques européennes et si elle avait défini des objectifs mesurables dans le domaine de l’agriculture et de la foresterie.

Ceci étant, parmi les mesures intéressantes, on peut insister sur la mise en œuvre complète des directives sur les oiseaux et sur l’habitat qui, en pratique nécessiterait des plans de gestion et plus d’argent pour le réseau Natura 2000, sur l’objectif de restaurer 15% des écosystèmes dégradés, en se penchant en particulier sur la création d’infrastructures vertes, comme la connexion de zones protégées, sur la nécessité de prendre des mesures favorisant la pêche durable et visant à lutter contre les espèces envahissantes en légiférant dès 2012 à ce sujet, ou encore en incluant les préoccupations sur la biodiversité dans la politique de coopération au développement de l’Union.

Parce que la protection de la biodiversité représente également des enjeux économiques, la Commission a tenu à ce que la pollinisation par les insectes, qui décline fortement en Europe et dans le monde, a une valeur économique évaluée à 15 milliards d'euros par an dans l'UE.

Cette stratégie a été saluée par de nombreuses ONG comme un pas dans la bonne direction, mais le vrai test pour qu'elle fonctionne dépendra évidemment de la volonté politique et des législations qui seront adoptées !

La Commission européenne, qui n’a pas fourni de coût total de mise en œuvre de sa stratégie, s’est dite prête à augmenter le taux de dépense effective des fonds réservés à la protection de la biodiversité, moins bon que pour d’autres catégories, à faire de la place pour la biodiversité dans son budget pour la période 2014-2020 et à élaborer des modes de financement innovants, tels que les partenariats public-privé.

Faisant suite à cette nouvelle stratégie européenne de la biodiversité, la France a présenté le 19 mai, soit un peu avant la journée internationale de la biodiversité, sa stratégie nationale pour la biodiversité révisée. Cette dernière se démarque certes de la précédente adoptée en 2006, soit plus de 10 ans après l’adoption de la Convention internationale sur la diversité biologique, véritable texte fondateur en matière de conservation et de gestion des ressources biologiques, mais n’en reste pas moins sous de nombreux d’aspects trop frileuse.

Si nous saluons la reconnaissance du rôle joué par les collectivités locales et notamment les Régions, si nous applaudissons l’initiative d’assortir ce document cadre d’une « charte d’adhésion des parties prenantes », notamment les entreprises et les collectivités, qui prendront des engagements pour participer à l’enrayement de la perte de biodiversité, et si nous nous réjouissons de constater que sa réussite est notamment conditionnée à l’implication des acteurs économiques (agriculteurs, entreprises) , il nous est permis de nous interroger sur la portée réelle de cette nouvelle stratégie nationale. Permettra-t-elle réellement de stopper la perte de biodiversité et de permettre à la France de respecter les engagements européens ainsi que les engagements pris lors de la 10e conférence des parties à la Convention sur la diversité biologique à Nagoya en octobre dernier ?

Rien n’est moins sûr.

Premièrement, nous aurions souhaité que l’Etat prenne des engagements à la hauteur des enjeux, et s’engage à prendre au plus vite des mesures efficaces, plus particulièrement en matière réglementaire.

Deuxièmement, nous attendions de la nouvelle SNB qu’elle s’accompagne d’une volonté politique forte de mise en cohérence avec les autres politiques publiques : sachant que toutes les politiques sectorielles impactent la biodiversité, elles doivent évoluer pour la prendre réellement en compte. Le MEDDAT ne doit pas être le seul ministère à porter la stratégie nationale pour la biodiversité. Celle-ci doit être portée par l’ensemble des ministères. Aussi, il aurait sans doute été innovant de prévoir un passage de la SNB devant le CIDD. Il aurait également été intéressant que chaque décision de chaque ministère fasse l’objet d’un arbitrage en faveur de la biodiversité. La récente décision du ministre de l’agriculture de permettre aux agriculteurs d’utiliser les jachères réservées à la biodiversité est complètement insensée ! Comment assurer la bonne santé des sols et s’assurer du bon fonctionnement du cycle de l’eau si le secteur agricole les surexploite ?
Troisièmement, alors que nous nous réjouissons que figure désormais dans ce document stratégique le besoin de territorialiser les actions, il semblait essentiel d’encourager une déclinaison de la SNB en stratégies régionales cohérente avec les déclinaisons sectorielles des différents acteurs. Quatrièmement, la principale lacune de la SNB 2011-2020 est qu’elle ne pose aucunement la question de son financement au niveau national et territorial dans un contexte de baisse budgétaire. Elle ne fait état (i) d’aucune création de flux financiers innovants et conséquents pour permettre sa mise en œuvre, (ii) d’aucune création d’instruments économiques dont la fiscalité pourrait poser des problèmes d’équité et sur laquelle il serait nécessaire de travailler collectivement, et iii) de la nécessité de mettre en cohérence des moyens financiers et humains.

Enfin, il aurait été souhaitable de définir une batterie d’indicateurs nationaux de suivi de la biodiversité afin de savoir où nous en sommes année après année et d’avoir une vision des politiques efficaces à maintenir et des politiques inopérantes à supprimer.

Si les grandes orientations de la stratégie nationale pour la biodiversité ont été co-construites avec les parties prenantes dans un esprit grenellien que nous trouvons intéressant, le plan d'action, véritable partition pour la mise en musique de la SNB a été, en revanche, élaboré par le gouvernement et sera dévoilé que dans les jours à venir. Ce plan d’action devrait permettre au gouvernement de placer, en face des objectifs ambitieux affichés, des moyens suffisants. En particulier en imaginant des mesures fiscales favorables à la biodiversité, à l'image des redevances qui financent la politique de l'eau. Sur fond de préparation de la loi de finances pour 2012 et de réforme fiscale, la question est bien d'actualité ! Ce plan d’action devrait également inscrire au calendrier 2011-2020 certains chantiers, en particulier celui d'une Agence de la nature, sur le modèle de l'Ademe pour l'énergie ou celui de l'articulation entre la SNB et les stratégies régionales pour la biodiversité. Ce plan d’action s’inscrira-t-il dans ce schéma innovant ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire