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Albert Likuvalu

jeudi 19 juillet 2007

Projet de loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs

Les objectifs de ce projet de loi

Tenir un engagement électoral en proposant une loi sur le service minimum et répondre aux exigences des élus locaux de l’UMP confrontés à la grogne des usagers notamment concernant les transports interurbains qui ont connu des conflits durs encore récents, notamment dans le sud-est de la France.

Faire porter aux collectivités territoriales et notamment aux Régions et aux grandes villes, la responsabilité du service minimum et de l’indemnisation des usagers sans moyens supplémentaires, tandis que l’Etat se désengage de plus en plus du financement des investissements du réseau des transports publics.

Satisfaire pour partie des exigences du Medef vers la libéralisation des services publics en encadrant et restreignant l’exercice du droit de grève et permettre au Gouvernement de se prémunir d’éventuels mouvements de grève lors de la future réforme des régimes spéciaux de retraite.

Le ministre du travail Xavier Bertrand, qui présente ce texte devant le Sénat le 17 juillet dernier, stigmatise les grèves comme cause des perturbations supportées par les usagers des transports publics : « ce projet de loi instaurant un service minimum, poursuit un triple objectif : éviter au maximum le recours à la grève, éviter au maximum la paralysie des transports en cas de grève et éviter l’absence d’information aux usagers. » (A noter que curieusement le ministre du travail est seul à être chargé de ce texte et que secrétaire d’Etat chargé des transports n’est pas présent).

En réalité, ce projet de loi n’instaure pas de service minimum. Il renvoie à un accord cadre dans les entreprises, voire dans les branches sur les procédures de prévention des conflits. Il renvoie aux autorités organisatrices des transports le soin de définir les dessertes prioritaires.

Sous couvert de dialogue social et de continuité du service public, ce projet de loi va rigidifier les relations sociales dans les transports publics. Il va faciliter la poursuite du désengagement de l’Etat des services publics, en dégageant les difficultés sur les régions, tout en dédouanant le Gouvernement auprès de l’opinion publique par une politique de communication sur l’instauration du service minimum.

Le service minimum, un sujet récurrent

Il a fait l’objet d’au moins une quinzaine de proposition de loi de la droite au Parlement. En 1998, il y avait eu des mouvements de grève importants, à Air France avant la coupe du monde en juin, chez les contrôleurs de la SNCF en décembre. La SNCF avait connu 180 000 jours de grève (soit 1 jour de grève par agent) et les conflits locaux dans les transports publics urbains avaient augmenté de 75 %. Suite à ces grèves une proposition de loi de Dominique Bussereau avait été déposée et discutée à l’Assemblée nationale en mars 1999 sans pouvoir être adoptée. Et en décembre 2003, a eu lieu un débat en séance publique sur « la conciliation des exigences de la continuité du service public des transports et du droit de grève », pour donner suite au problème posé à travers la proposition de loi de Christian Blanc.

Ensuite le rapport Mandelkern de 2004 a précisé le futur cadre juridique du service minimum, suivi de l’action menée par Dominique Perben en 2006 pour améliorer la prévisibilité des services de transport.

Depuis les grèves de décembre 1995 dans les transports publics, les usagers sont devenus massivement favorables à l’instauration d’un service minimum dans les transports collectifs, même si le problème des grèves est devenu très nettement moins aigu depuis l’application des accords d’alarme sociale à la RATP et à la SNCF. L’application d’un service minimum est devenu un des sujets de la bataille médiatique auprès de l’opinion publique que confortent les récents sondages d’opinion, qu’ils soient utilisateurs ou pas de transports en commun publics !

Le service minimum, un engagement important de Nicolas Sarkozy

Ce projet de loi est la traduction d’un engagement important de Nicolas Sarkozy durant la campagne pour l’élection présidentielle, reprenant la proposition 85 du projet de l’UMP : « Instaurer par la loi le service minimum garanti dans les transports publics et les autres services publics essentiels en cas de grève ». Lors de son discours au congrès de l’UMP le 14 janvier 2007, Nicolas Sarkozy s’est exprimé ainsi : «Je souhaite une loi sur le service minimum dès le mois de juin 2007. Je souhaite en outre qu’une loi impose le vote à bulletins secrets dans les 8 jours du déclenchement d’une grève dans une entreprise, une université, une administration ».

A noter que lorsque le vote des salariés est abordé dans des propositions de loi des députés UMP sur le service minimum, il est envisagé avant la décision de faire usage du droit de grève.

Lors de sa présentation dans les médias (Interview TF1 20 juin 2007) de son action en tant Président de la République, Nicolas Sarkozy a réaffirmé son engagement sur le service minimum et les modalités de vote des salariés, et a étendu le champ de l’organisation d’un service minimum à l’enseignement scolaire où se pose le problème de l’accueil des enfants.

Le 17 juillet 2007, premier jour du débat au Sénat, François Fillon estime que le projet de loi peut servir d’exemple pour l’Education nationale.

Les conflits se sont considérablement réduits dans les transports publics

Les accords de la RATP de 1996 sur l’alarme sociale (suivi de l’accord de 2001), puis l’accord Air France, et l’accord SNCF en 2004, ont considérablement réduit les situations conflictuelles dans ces entreprises et leurs conséquences pour les usagers. Xavier Bertrand, lui-même reconnaît devant le Sénat que « l’accord d’alarme sociale conclu dès 1996 à la RATP a réduit de plus de 90 % le nombre de jours de grève en dix ans » et qu’il y a eu des « efforts » faits dans ce sens à la SNCF.

Lors des travaux préparatoires d’auditions organisés par la commission spéciale du Sénat, visiblement les chefs d’entreprise de la RATP et de la SNCF ont tenu à faire part largement des effets positifs sur la prévention des conflits des accords d’alarme sociale dont le fonctionnement est très satisfaisant à la RATP et la procédure de demande de concertation immédiate (DCI) largement utilisée à la SNCF.

Effectivement, 2006 est l’année où il y a eu le moins de conflits. Pour la SNCF la moyenne est de 0,79 jour de grève par agent et pour la RATP la moyenne est de 0,4 jour. Aucun chiffre n’a jamais été aussi bas ! A la SNCF le nombre des incidents serait de 6 043 incidents de retard de transport, dont près de 140 seraient dus à des conflits soit 2,3 % en raison de mouvements sociaux contre 28,06 % dus à des défaillance matérielles. Il y aurait eu 700 préavis sur 250 établissements contre 1 200 il y a 10 ans, qui n’ont pas forcément débouché sur une grève.

Les grèves ne sont pas la 1ère cause de perturbation des transports publics

Comme l’a souligné la Fédération des usagers des transports et des services publics (FUT-SP) devant la commission spéciale du Sénat, « les grèves ne constituent pas la première cause de désagrément pour les usagers, confrontés quotidiennement à des incidents techniques, sources de retards et de suppressions de trains ». La Fédération a en revanche déploré le délaissement du réseau ferré francilien, qui représente pourtant 2,5 millions de trajets par jour, soit la moitié des trajets effectués en semaine sur le territoire national. La SNCF concentre en effet la majeure partie de ses investissements sur les lignes à grande vitesse, créant ainsi, un service public des transports « à deux vitesses » !

Pour la Fédération nationale des associations d’usagers des transports (Fnaut), les grèves ne sont en général pas le principal motif de déficience, considérant que l’amélioration du service ne pourrait être réellement obtenue que par un effort d’investissement massif dans les infrastructures aujourd’hui sous-développées. Un audit réalisé par l’école polytechnique de Lausanne considèrerait que 50 % du réseau ferré français nécessiterait une intervention.

Le service minimum pour gagner la bataille médiatique

Certains commentateurs, s’interrogent sur l’objectif de ce projet de loi sur le service minimum, alors que le nombre de jours de grève n’a jamais été aussi faible à la RATP, mais également à la SNCF.

Pourtant le ministre du travail Xavier Bertrand pousse le vice jusqu’à ouvrir un forum sur internet sur « Les grèves dans les transports publics : comment mieux prévenir, mieux organiser, mieux informer ». Ce forum fait écho à la question de la mise en place d’un service minimum, en laissant endosser la responsabilité des perturbations que rencontrent les usagers des transports publics aux seuls conflits sociaux !

Il faut toutefois remarquer dans le texte du projet de loi, que les termes « service minimum » sont tabous et ne sont pas inscrits dans le titre de ce projet de loi, ni dans les articles techniques, ni dans l’exposé des motifs qui évoque « un service réduit et prévisible ». Dans le projet de loi, il est question d’accord de prévisibilité et de plan de transport adapté organisé avec les non grévistes.

Suite au ballon d’essai lancé le 17 juillet par François Fillon sur FR3, lors de la première journée du débat au Sénat, ouvrant le champ du service minimum à l’éducation nationale et suite à la très vive réaction des organisations syndicales de l’enseignement, le Gouvernement a fait marche arrière momentanément.

Au Sénat, Xavier Bertrand campe sur les seuls services publics dans les transports terrestres au Sénat bien qu’un amendement de la commission proposait d’évaluer la loi et au vu d’un bilan de l’étendre à d’autres modes de transport, voire de la transposer à d’autres services publics. Cet amendement n’a pas été adopté en

l’état. Enfin l’Elysée par la voie du conseiller spécial du Président, Henri Guaino a coupé court a toute discussion en affirmant dans le Monde du 23 juillet : « Il n’est pas prévu de service minimum dans l’éducation…nous n’en sommes pas là ». Toutefois il signale qu’il faudra « réfléchir à l’obligation d’accueillir les enfants même les jours de grève dans le primaire ».

La responsabilité du service minimum incombera aux Régions

Le gouvernement fait porter la responsabilité aux autorités organisatrices de transport, notamment aux régions, d’organiser un plan de transport adapté et un plan d’information des usagers, sans aucun moyen supplémentaire pour organiser la continuité du service public en cas de grève ou autre perturbation prévisible du trafic et la responsabilité d’imposer aux entreprises de transport le remboursement des titres de transport des usagers.

Selon l’ARF, les Régions qui sont attachées à la qualité du service des transports publics constatent pour leur part, que l’essentiel des dégradations des services de transport, sont dues aux problèmes de maintenance du matériel et des infrastructures, de manque de moyens et sont rarement dues à des grèves. Les Régions souhaitent que l’Etat donne aux acteurs du système ferroviaire les moyens de l’entretenir, de le moderniser et le développer. Certaines autorités organisatrices ont déjà introduit des dispositifs de prévisibilité et de niveaux de service garanti dans l’ensemble des cas de situation perturbée.

L’ARF, est convaincue de l’absolue nécessité de développer d’abord le dialogue social. Les autorités organisatrices n’ont pas vocation à se substituer soit à l’Etat dans sa mission de garant du service public, soit à l’exploitant pour ce qui est de la définition précise des services en cas de perturbation, notamment en matière d’information préalable des usagers. Enfin, les autorités organisatrices n’ont pas vocation à supporter directement ou indirectement les conséquences d’une volonté de l’Etat d’assurer une indemnisation des usagers.

Les organisations syndicales posent les exigences du service public et voient un encadrement et une atteinte à l’exercice du droit de grève

L’ensemble des organisations syndicales qui ont été auditionnées par le groupe socialiste à l’Assemblée nationale est hostile, à des degrés divers, au projet de loi.

Points critiqués par les organisations syndicales :

Elles jugent inutile ce texte, l’application des accords sur l’alarme sociale ayant très largement fait leur preuve quant au règlement des conflits sociaux par le dialogue social préalable.

Elles jugent ce texte par contre dangereux car il va rigidifier les conditions du dialogue, allonger la période de préavis de grève, sachant que la grève étant la résultante de l’échec du dialogue social

La déclaration du salarié gréviste 48 heures avant la grève accompagnée d’une menace d’une sanction en cas de non déclaration, risque surtout de durcir les relations sociales dans les petites entreprises de transport interurbain. La pratique de la prévenance existe déjà de fait là où des accords d’alarme sociale s’appliquent, c'est-à-dire dans les grandes entreprises de transport.
Le vote des salariés au bout de huit jours de grève, est perçu comme une atteinte au droit individuel de grève et peut poser la question de la constitutionalité du texte au regard du droit individuel de grève. Le Sénat, pour sa part, a introduit l’intervention d’un médiateur qui pourra par contre intervenir dès le début de la grève.

Enfin le non paiement des jours de grève confirmé dans la loi est perçu comme une véritable provocation. De plus, le Sénat a aggravé la disposition en élargissant l’interdiction à toute compensation directe ou indirecte de la retenue de salaire, ce qui interdit tout compromis de sortie de conflit difficile !

Enfin les organisations syndicales ne sont pas dupes, ce projet de loi constitue une ouverture vers l’ultralibéralisation des services publics qui subissent l’insuffisance des investissements dont les usagers subissent au quotidien les conséquences. Elles n’ignorent pas que le Medef souhaite que soit posée « la question de la continuité des transports aériens et maritime, du transport de marchandises, du service postal et de l’accueil des enfants dans les écoles » ! (Audition du Medef devant la commission spéciale du Sénat)

Face aux intentions du Gouvernement de réduire encore plus les services publics et de restreindre le droit de grève, les organisations syndicales des fédérations de transports CGT, CFDT, FO et CFTC ont appelé à une journée de mobilisation le 31 juillet et à manifester devant l’Assemblée nationale le 31 juillet lors du débat sur ce texte.

samedi 14 juillet 2007

Ouverture dominicale des commerces

La majorité a adopté un amendement sénatorial au projet de loi de développement de la concurrence qui permet l’ouverture dominicale des « établissements de commerce de détail d’ameublement ». Il ouvre une brèche supplémentaire contre le repos dominical pour répondre au lobbying de quelques grandes enseignes d’ameublement au premier rang desquels se situent l’enseigne IKEA et l’enseigne Conforama. Madame Isabelle Debré, la première signatrice UMP de cet amendement l’a expliqué comme nécessaire pour que les couples puissent faire des achats « « réfléchis » en famille, en toute sérénité ». Le Gouvernement a donné son aval.

La réponse positive de la majorité aux sollicitations de ces enseignes marque l’ancrage profond d’une promesse électorale de Nicolas Sarkozy au sein de ses troupes. L’explication en est simple selon Luc-Marie Chatel : « Le Gouvernement souhaite modifier la législation sur le travail du dimanche, qui est ancienne ; elle date en effet de 1906. Elle n'est donc plus adaptée à l'économie d'aujourd'hui. »

De fait le Gouvernement estime qu’il serait plus actuel de retourner à un droit antérieur à 1906. Il remet à l’honneur une idée économique libérale vieille de plus de deux siècles.[1]

Et, les choix du Gouvernement sont d’autant plus surprenants qu’il avait exposé en première lecture à l’Assemblée nationale que ce sujet devait faire l’objet d’une future loi. Il l’a redit au Sénat : « Il nous faut remettre à plat cette législation. Le Gouvernement souhaite bien évidemment le faire en concertation avec les partenaires sociaux. » Il s’est pourtant passé de cette concertation, non seulement des syndicats de salariés, mais aussi des représentants des petits commerces et des artisans.

Le motif en est des plus surprenants : « Il y a urgence dans un secteur qui, aujourd'hui, fait l'objet d'annulations d'ouvertures à la suite de recours intentés devant le tribunal administratif. Des astreintes sont versées chaque semaine qui passe par ces entreprises. » Le Gouvernement offre une prime à la contravention, à ceux qui peuvent la supporter, donc aux groupes les plus puissants qui renforcent ainsi leur position sur le marché. La concurrence est bien éloignée de cette nouveauté.

La CMP prévue le Mardi 18 décembre sera stratégique. Les négociants en ameublement s’opposent à cette mesure qui permet de porter le coup de grâce à de nombreux artisans du meuble, incapables de répondre à cette libéralisation du travail dominical.

Principe du repos dominical :

Le droit actuel est issu d’une lutte des mouvements des employés du commerce daté de la fin du XIXe siècle. Le 13 juillet 1906 : après un siècle de débat, l’Assemblée nationale votait à l’unanimité le principe du repos hebdomadaire pour les travailleurs. L’article 2 de cette loi posait ce repos hebdomadaire de 24 h le dimanche, sauf dérogation. Dès le départ, les grandes enseignes ont lutté contre le repos dominical, et notamment la samaritaine, qui a pu ainsi obtenir le roulement de ses salariés par dérogation pour certains rayons.

Les dispositions relatives au repos hebdomadaire des travailleurs sont posées par les articles L. 221-1 à L. 221-27 du Code du travail. D’une part, « il est interdit d’occuper plus de six jours par semaine un même salarié » (art. L. 221-3). Le repos « doit avoir une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives auxquelles s’ajoutent les heures consécutives de repos quotidien prévu à l’article L. 220-1 » (art. L. 221-24). Outre ces premières dispositions, le principe du repos dominical est posé par l’article L. 221-5 du code du travail : « Le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche. »

Dès l’origine, le législateur a posé un certain nombre de dérogations. Elles ont perduré et se sont mêmes accrues. Elles existent pour les métiers « à feux continus », lorsque le repos du personnel d’un établissement « serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de cet établissement », dans les communes touristiques ou thermales, zones touristiques pendant la ou les périodes d’activité touristique sur autorisation préfectorale, etc…

Par ailleurs, sont accordés cinq dimanches d’ouverture par an au choix pour les magasins.

Globalement, donc, l’ouverture dominicale est un principe déjà largement atténué. L’enquête emploi de l’INSEE enseigne que parmi les 24,7 millions de personnes ayant une activité, 7,4 millions de personnes, salariées ou non salariées (soit 30 %), déclarent travailler le dimanche. Parmi elles, un noyau dur de 3,4 millions de personnes déclarent travailler « habituellement » le dimanche, tandis que 4 millions déclarent travailler « occasionnellement ». Dans le commerce de détail, 39 % des actifs travaillent le dimanche, occasionnellement ou régulièrement. Le taux le plus élevé est celui de l’agriculture : 69 %.

Position de Nicolas Sarkozy

Au nom d’une « liberté de travailler » dont il fait le socle de son discours, Nicolas Sarkozy pose le principe de l’abolition du principe du repos dominical. Le programme de l’UMP pour les dernières législatives visait à « Permettre aux maires d’autoriser l’ouverture des commerces le dimanche, sous réserve du volontariat et de la juste rémunération des salariés concernés, pour que chacun soit libre de consommer ou de travailler le dimanche. » [UMP - programme législatif 2007, proposition n°8]

Il s’agit d’une demande qui vise à faire céder l’une des digues les plus importantes qui garanti le droit des salariés à une vie collective hors du travail. Elle conduit à la déstructuration des temps sociaux, des temps de consommation liés non seulement à la flexibilisation du temps de travail mais au développement des technologies de l'information et de la communication, qui « change la donne commerciale » selon la CCIP (rapport 2002). Par ailleurs, elle se fonde sur le postulat que l’encadrement du travail est cause du chômage.

Une proposition qui divise la droite et rencontre l’hostilité des PME

A l’UMP, les avis sont partagés malgré la prééminence de la position Sarkozy. Patrick Devedjian a proposé, en février 2005, dans le journal La Tribune, de permettre aux boutiques de prêt-à-porter – mais pas aux grandes surfaces – d'« ouvrir à terme tous les dimanches ». Dans un premier temps, le ministre suggérait d'autoriser huit ouvertures annuelles. Jusqu'ici le maire de chaque commune peut accepter, au maximum, cinq ouvertures dominicales par an. Seuls les magasins à dominante alimentaire peuvent ouvrir tous les dimanches matins. Le ministre du Commerce, Christian Jacob, s’est alors opposé à son collègue. Pour lui, les centres d'usines seraient les grands gagnants, au détriment des petits commerces qui n'ont « pas le personnel » pour ouvrir le dimanche. Il demandait alors : « Voulons-nous d'une société dédiée au tout-consommation, sept jours sur sept ? »

En 2005, déjà, les professionnels de l’habillement s’étaient opposés à la proposition d’assouplissement du travail le dimanche. Ils avaient dénoncé une fausse bonne idée. « M. Devedjian a devant lui une grande carrière de gagnant à Hollywood. Il a provoqué l'hilarité de nos adhérents », avait ironisé Charles Melcer, le président de la Fédération nationale de l'habillement, qui représente 50 000 commerçants indépendants. La FNH estime que de nombreux emplois seraient en danger.

Il faut aussi noter que l’UPA (union professionnelle artisanale) est opposée à l’ouverture du dimanche. Dans un document où elle fait part de 107 propositions, elle analyse cette ouverture comme destructrice d’emplois. La proposition 84 expose même qu’il convient d’« appliquer strictement les règles actuelles concernant le repos dominical des salariés. » Pour elle, « il n’est pas souhaitable de modifier le principe de repos dominical des salariés. La généralisation de l’ouverture dominicale des commerces permettra en effet aux grandes surfaces de s’organiser, avec leurs salariés, pour ouvrir sept jours sur sept. Les artisans et commerçants indépendants, qui emploient en moyenne trois ou quatre salariés, seront, eux, dans l’incapacité de le faire. Au final, de nouveaux milliers d’emplois seront détruits dans le commerce de proximité. »

Enfin, la CGPME a pu rendre publique une enquête, faite auprès de ses adhérents lors du dernier trimestre 2006, très hostile à l’ouverture dominicale. Les résultats sont sans appel, il suffit de citer le document :

« 87% des commerçants ayant participé à cette enquête sont favorables au maintien du principe du repos hebdomadaire, 90% d’entre eux souhaitant que ce repos hebdomadaire reste dominical. Ce taux est de 94 % pour les commerces non alimentaires (96% pour l’équipement de la personne, 84% pour l’équipement du foyer et 94% pour les magasins de sport) alors qu’il n’est que de 48% pour les alimentaires. Ce dernier résultat peut s’expliquer par le fait que les commerces alimentaires bénéficient déjà d’une dérogation légale à l’interdiction d’ouverture dominicale des commerces. En effet, en application des articles L. 221-9 et R. 221-4-1 du Code du travail, les commerces à prédominance alimentaire peuvent ouvrir jusqu’à midi. Sur ce point, il existe une forte demande de la part du commerce alimentaire d’obtenir une dérogation jusqu’à 13 heures. »

Des syndicats opposés en symbiose avec la majorité des Français

La CGC semble ouverte à une réflexion, mais à certaines conditions : « Une majoration de salaire de 100 % avec un repos compensateur à même hauteur doivent être envisagés. Cette majoration se cumulerait avec un droit à un repos hebdomadaire de 48 heures consécutives. » D’autres conditions sont mises à cette ouverture à la discussion : « Maintenir une concordance des temps sociaux comme référence : il est nécessaire que les temps productifs soient interrompus par des temps sociaux au cours desquels les salariés puissent, un même jour, profiter d’une vie familiale, sociale, culturelle, associative, sportive, religieuse… »

Pour le reste, les syndicats son unanimes.

L’UNSA est contre la déréglementation du travail dominical. Elle demande le respect de la loi actuelle et met en garde contre toute tentation d’ouverture des magasins 7 jours sur 7. Pour elle, « toutes les professions liées à ces activités seraient à leur tour concernées : seuls les centres commerciaux et les grands magasins pourront assumer les charges correspondantes, au détriment des petits commerçants. » « Enfin, le travail dominical a des répercussions néfastes sur la vie familiale, notamment pour les familles monoparentales. »

A Force ouvrière, l’opposition est identique. "Le chiffre d'affaires n'est pas généré par le travail du dimanche, il est simplement déplacé", explique Françoise Nicoletta pour FO. Or "sans chiffre d'affaires supplémentaire, la masse salariale n'augmente pas", dit-elle. A titre d'exemple, le magasin Virgin des Champs-Elysées, ouvert tous les dimanche, est passé de "407 emplois en 1991 à 237 en 2005", affirme FO.

La CFDT suit cette opposition. A noël, en 2006, elle a pu indiquer que « le volontariat sur lequel est censé reposer le travail dominical confine à l’hypocrisie : « Le volontariat du précaire et du salarié pauvre n’existe pas. C’est l’employeur qui désigne ces “volontaires”. » Même constat sur les primes accordées le dimanche : « Les salariés à temps partiel contraint ou en CDD préfèrent de loin avoir des salaires décents tout au long de l’année qu’espérer une hypothétique prime de travail dominical ». Prime que les TPE, les sous-traitants et les fournisseurs sont, pour la plupart, dans l’impossibilité matérielle de payer. De plus, le chiffre d’affaires réalisé le dimanche entame celui du reste de la semaine, puisque, comme le précise Gilles Desbordes, « le pouvoir d’achat des Français n’obéit pas aux mêmes lois que les amplitudes d’ouvertures ». Surtout au moment où la faiblesse du pouvoir d’achat est au centre de toutes les préoccupations.

Pour la CGT, « le débat engagé sur le travail du dimanche, c’est une attaque aux conditions de vie. Il dépasse largement le commerce et l’ouverture des magasins, tout le monde est concerné. »

Les syndicats sont suivis par la majorité des Français. Si ceux-ci, en tant que consommateurs, semblent souhaiter l’ouverture dominicale, il en va différemment lorsque l’on interroge les personnes en tant que salariés.

Cette ouverture peut apparaître avoir la faveur des consommateurs. Elle est en revanche combattue par ceux qui travaillent. Selon un sondage BVA, réalisé fin juin 2006 auprès de 482 salariés, "88% des Français veulent préserver le dimanche comme jour de repos commun, 75% ne veulent pas travailler le dimanche, et 82% ne dépenseront pas davantage si les commerces sont ouverts 7 jours sur 7",

Un sondage paru dans le Journal du Dimanche le 9 décembre 2007 confirme cette opposition. Ici, 53% des Français rejettent le dimanche travaillé. Mieux, seules 26% des Français sont prêts à travailler le dimanche. Et 59% préfèreraient, s’ils en avaient le choix, renoncer à travailler le dimanche et de gagner plus pour préserver le week-end. Cela est d’autant plus intéressant que dans les secteurs où le travail du dimanche est normalisé, comme la restauration, le salaire reste au taux normal, prouvant que la banalisation du travail le dimanche conduit à la banalisation de sa rémunération..

L’opposition du Conseil économique et social à la banalisation

Saisi par Dominique de Villepin alors Premier Ministre, le Conseil économique et Social a rendu un avis négatif à l’ouverture dominicale généralisée en février 2007. Il s’est dit opposé à toute généralisation et adopte une posture de prudence extrême sur un sujet dont il explique qu’il est d’abord celui d’un « choix de société ».

Le CES expose ainsi : « Après avoir pesé l’ensemble des arguments et procédé à un large tour d’horizon prenant en compte les différentes sensibilités et les divers enjeux, le Conseil économique et social considère qu’il est nécessaire de conserver un point d’ancrage stable pour la vie familiale, le lien social et les activités associatives. Même si l’évolution des modes de vie et l’interpénétration des temps de travail et des temps de loisirs modifient les rythmes et confèrent une plus grande latitude quant aux choix individuels des jours de repos, le dimanche conserve un caractère structurant pour le plus grand nombre.

"Une extension généralisée de l’ouverture dominicale des commerces entraînerait des modifications structurelles substantielles dans l’organisation du fonctionnement de la société, impliquant nombre d’autres professions et notamment les services publics, les services à la personne (ouverture de crèches pour garder les enfants...) et les services de logistique et de maintenance. De même l’équilibre entre les diverses formes de commerce pourrait se voir remis en cause de façon accélérée. »

Pour autant, le cadre légal et réglementaire pourrait évoluer selon le CES, pour plus de simplicité notamment. Les règles sont désormais très compliquées, et la majorité qui dit vouloir simplifier la lecture du droit du travail vient de rajouter une ligne à sa complexité par l’amendement sénatorial en faveur de l’ouverture dominicale des magasins de meubles.

D’abord, les commerces figurant au nombre des dérogataires de plein droit, ne devraient plus désormais faire l’objet d’un arrêté de fermeture préfectoral.

Puis, par souci d’adaptation aux rythmes de vie, l’ouverture autorisée jusqu’à « midi » serait portée à 13 h. A charge donc pour les salariés de commencer la vie de famille après 14h… On peut trouver assez étonnant une telle évolution. Le midi serait ainsi décalé. Cette orientation conduirait peut-être à décaler tous les rythmes de travail sur le modèle « parisien » d’un début de journée à 9h30.

En outre, dans les zones touristiques, il conviendrait de prévoir une actualisation de la délimitation de ces zones et périodes touristiques qui « doivent être définies avec la plus grande rigueur et appliquées à leur objet, afin d’éviter des abus et des distorsions de concurrence. À cette occasion, le Conseil économique et social attire l’attention sur la situation particulière des travailleurs saisonniers ou à temps partiel. »

Concernant l’ouverture exceptionnelle de cinq dimanches par dérogation ( ouverture de plein droit, chaque commerce pouvant choisir la date qui lui convient, à condition de déclarer les dates retenues à la préfecture, après consultation des partenaires sociaux, notamment au niveau des compensations salariales). Le CES recommande des ouvertures concertées au niveau local, que le volontariat des salariés demeure la règle, ainsi que les compensations prévues par la loi ou les accords collectifs et le respect de délais de prévenance suffisants.

En réalité le CES craint les effets déstructurants de la libération du travail le dimanche.

Une déstructuration sociale

L’argumentation de Nicolas Sarkozy est le slogan : « travailler plus pour gagner plus ». Or l’analyse des vœux patronaux entre en contradiction avec ce slogan puisque, dans une étude de 2002, la Chambre de commerce et de l’Industrie de Paris (CCIP), exposait qu’il fallait : « Abroger l’obligation légale, pour les commerces de détail, de majorer la rémunération versée aux salariés travaillant le dimanche, quelle que soit la surface de vente. Cette abrogation ne pourra bien évidemment pas avoir pour effet de réduire le montant annuel de rémunération qui aura pu être antérieurement versé sous l’emprise de la législation actuelle ».

Il est légitime de s’inquiéter pour les nouveaux salariés, même si la CCIP expose qu’il faudra néanmoins négocier des contreparties.

Hors ce positionnement, qui ne laisse d’inquiéter, la question du travail du dimanche pose la question du temps social partagé, comme l’a rappelé justement le CES en février 2007.

De nombreuses activités, sportives, associatives…. Reposent sur la présence des participants le dimanche. Mais la vie familiale a aussi besoin d’un temps de réunion, temps social structurant sans quoi il semble difficile d’en appeler à la responsabilité parentale quant à l’éducation des enfants.

Cette ouverture fait reposer toute la société sur le fondement de la consommation. L’ère de l’hyperconsommation conduirait les citoyens à ne se définir que comme consommateurs.

De fait, l’ouverture généralisée des commerces imposerait des conséquences aux services connexes, notamment au secteur du transport (l’interdiction de circulation le dimanche devrait sans doute être levée pour les besoins de la fourniture des magasins). Tous les services aux entreprises seraient aussi touchés (informatique, gardiennage….), de même que les services publics (comme la poste par exemple) ainsi que les services de garde d’enfants. Mais dans ce cadre, les petits commerçants seraient fragilisés dès-lors qu’ils se situent loin des centres commerciaux.

Il apparaît enfin essentiel de reprendre les mots mêmes des réponses ministérielles de l’actuel Gouvernement sur le sujet : « Le principe fondamental de la réglementation relative au repos hebdomadaire des salariés reste celui du repos dominical. Le respect de ce principe, posé à l'article L. 221-5 du code du travail, constitue à la fois une règle protectrice des salariés et une condition du maintien d'une situation d'égalité des conditions de concurrence. » (Réponse publiée au JO le : 04/04/2006 page : 3731)

Cette réponse montre toute la duplicité de la campagne en faveur de l’ouverture du commerce le dimanche. L’accepter au nom de la liberté reviendrait à supprimer « une règle protectrice pour les salariés et une condition du maintien d'une situation d'égalité des conditions de concurrence ». C’est ce à quoi s’est attachée la majorité sénatoriale dans sa lecture du texte pour la concurrence en faveur des consommateurs.